DOMINIQUE QUELEN
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DOMINIQUE QUÉLEN
La gestion des espaces communs

"Tous les trois pas (ou pour mieux dire, chaque trois pas, car ils forment une unité), nous nous arrêtons pour respirer, assouplir les tissus conjonctifs, étudier, nous ouvrir, bâtir avec des outils, des objets, des matériaux, une cabane pour les ranger. À la fin, nous aurons fait plusieurs fois le tour, pensé, senti, agi, vécu. Nous aurons été tout ce temps-là en chantier."

2019, Lanskine


2018, Flammarion

DOMINIQUE QUÉLEN
Revers

« Un jour j’ai un cliquetis drôle dans le haut de la tête
mais la machine va bien et alors ça va. Ça va passer
ou se dissiper. Je dérègle un truc et je tombe. Je
provoque ça. Je l’arrache à une insomnie longue et
douloureuse. Le jour fait un bruit de pas où des gens
et des oiseaux iraient et viendraient. Autres soup-
çons d’amour. Autres fêtes. Corps et têtes d’oiseaux
empaillés à des lieues du bruit rigolo. Fais-le dans le
rêve et dans l’insomnie ensemble. On l’a. Il provoque.
Et puis vous et nous on dérègle à fond et on se meurt.
C’est ça et quoi ? Ça et la dure machine de la tête ? La
vie passée dans des cliquetis ? Pluriel de un ? »

 

 


 « La nuit. Belle leçon d’art et de beauté ! On l’inflige
à un oiseau ? Comme à l’objet dont la fuite et le fin
gazouillis de joie ont un son égal. Quel vol ? Quel
cri est-ce ? C’est une rage qu’il faille le dire dans ce
poème. L’ai-je mis en ordre ? Il est naturel d’oser des
visions de choses diurnes sur des choses nocturnes.
Des jours. Naturel d’oser l’ordre de dissiper l’obscu-
rité dans chaque faille. L’oiseau a une limite. Il est en-
ragé en vol. Le mur du son. Énorme ! Et de la nuit la
fin est prévue. La voici. C’est à toi. Un oiseau ou toi
avez l’opportunité de tirer la leçon alors tire-la. »

 « On est fatigué. Ne peut-on ? Ne sait-on ? Oui ? Com-
ment mal s’y prendre ? Cette note en dessous ou en
haut. Cet acte d’être sur du sol. À ça du réel endroit
où sans cesse on a le but d’aller. Changer n’étant ni
une ni deux. Le but ? Pour y faire quoi ? De parler
on meurt d’une fatigue à aucune fin. Une façon de
mourir de cette façon. Il n’y a aucune autre mieux.
D’un autre parler avec quoi faire usage à part le
corps ? Pire ni mieux à changer en quoi pour le dire
mieux sans excès de réel ? Le langage ? Du dé et de
l’acte de jeter ici ou là telle note ? Le dé à prendre en
main comment si rien ne sait le dire ? On ne sait.
Sait-on ? »


2017, Louise Bottu

DOMINIQUE QUELEN
avers

"Il n'y a rien. Se dire ça. On saisit ? C'est par ici ou par l'une ou autre oreille que ci et ça entrent. Il = je = tu = lui = moi ? Il manque qui ? À cette liste ou chose portable qu'on a lue n'est absent que le pronom toi. Vrai ou faux ? Sentiment vrai de la vérité ? La vérité ? La vie ? Ce n'est pas ça. La vie = un songe. La poésie y va de ce sentiment ? Oui. Non. Vrai et faux. Ni le lieu où on est ni l'ombre qu'on a. La chose moyenne. Cette poésie manque. Une langue lui manque ici. Il en faut une et on a l'oreille dessus ! Et l'oeil ! Bout par bout on saisit du sens. Où se planquait-il ?"


DOMINIQUE QUÉLEN
Eléments de langage

" la terre, le chemin terreux entre les prés. Comme une reprise dans un drap. L’aube grise, nuit débouchant dans une nuit plus claire. Le sentiment de durées emboîtées, le peu de jour, de douleur, rendent l’instant bien simple. La main seule avancée, fruit peu charnu, pour écarter les derniers obstacles. Puis l’odeur sans nom de la rivière. "

"Entre le vers sec et les eaux grasses de la prose, la loque, une autre fois, suinte son eau"

"ne jamais changer de chaussures au milieu d’une phrase : elle serait perdue, vieille prose dans un rythme neuf, et le mot juste espéré comme un être cher. La pensée, pour être fluide et ferme dans ses détours, s’accommode assez bien d’un pas régulier. Les hauteurs la ruinent, la ramènent à ce qu’elle est : un semblant de victoire sur soi "

"Quand l’eau rétrécie s’est refermée sur elle-même, retenant toute l’eau antérieure, et que l’air autour se reforme "

"le moindre sentier sent sa petite odeur de bois gris, d’ombres couchées."

 

2016, publie.net


2015,Le Théâtre Typographique

DOMINIQUE QUÉLEN
Basses contraintes

"Une histoire surgit d’une histoire. Les peurs. Leur énigme puis sur nous la faim et la soif. Fables abrégées on les devine déjà sur l’aile. L’essai de méthode ? Un récit ? Et dans de purs oiseaux une ombre. Sans bois ? Sans lac ornemental ? Un tableau fait d’autres vapeurs. Nous suçons des os. La question de ton être est là. Où est-il ?"

"Le lyrisme. Un mot. Prenez un oiseau. Sa vie est courte. On dit ça. L’idée d’un chant est une hypothèse. Façon d’écrire très douteuse. Floue. Sujette à l’erreur. Ce ton plaît à l’oreille. C’est pour chanter ? Que nenni ! Et tu y dis et y redis et des voies emmènent autre part. La chose poétique est une chose. Pas une autre. Que tu y voies ou non. Et j’y ai dit puis tu une poésie que je savais pour toi. L’oreille tendue sur ton crâne aimait à devenir floue. Elle agit très bien. De façon calme. Pas une crise d’aphasie où dit ou non-dit est pareil. Oiseau demeure un mot sans la ni le."


"Le givre a ton chemin. Tu vas de biais. J’ai ma carte de la vie. Tu gèles. Ne mourir ? Un fait subsiste. Qu’on te donne un gramme ! Un mètre ! Un peu à boire ! Quel vol ça va être d’enlever tout oiseau d’ici ! Quel oiseau âgé volerait ? Que d’un côté. Je veux que tu sois absent ou mort ? Non. Je m’alarme. Mort que je le sois mieux quand je respire et que je vis. Et âgé aussi. Quelle chair d’oiseau à manger et d’ouvrage au vol généreux. Et à arpenter mètre ou champ. D’un givre noir qu’on a sera fait le souffle. Ne sens nulle vie dans l’air. Ma réponse est de dire le chemin fermé. Dis-le."


 



Morlaix, novembre 2015


Combourg, Octobre 2015



DOMINIQUE QUÉLEN
Oiseau, extraits

"Et la vie apparaît à nos orifices ? Une issue. Les aura-t-on tous vérifiés ? Par un jeu on fuit et stoppe. Qui met du liquide peut passer ce fleuve. Il est en bois. Quel trucage ! Trop fort ! On sait qui. Croit-on."

 

Maison de la Poésie de Rennes, Les Polyphonies 2014

 

Lecture Les Oiseaux, extraits: Prise de son et mixage, Radio Univers

 

2014, Contrat Maint

 

 



DOMINIQUE QUÉLEN
Enoncés-types

" Je surveille et je fais le bilan par degrés. Je ne surveille pas et ne fais pas le bilan. Je me tiens dans cet écart. À partir de là ça devient possible dans un point précis du monde. Je suis caractérisé par une partie en moins qui continue d’exister. Le présent comme catégorie de l’espace l’environne et la délimite. Le corps est mesuré dans sa totalité. On dirait qu’un seul point le constitue. Géométrie différente. Principes ramenés aux plis qu’ils font sur le plan.Ca commence au moment où ça s’arrête. " 

"Je fais de l’action. Vivre est comme écrire pendant vingt ou vingt-cinq minutes. Une puissante avancée géométrique parle. C’est retranscrit au maximum. Un renard sort du bois sous la forme d’un chant. Je vois que c’est impossible. Des hauteurs de murs sont calcinées. La brièveté progresse. Un chien gît. Rien de grave n’atterrit dans le récipient. "

 

 
2014, Le Théâtre Typographique

2012, l'Âne qui butine

DOMINIQUE QUÉLEN
Des seconds & premier

"ROE EGGS (m. pl.) – Chanson : « Quel tourteau », etc. 
MOELLON (m.) – Oiseau vivant. Coups successifs (sous-entendu : contre). Succession d’instants rapprochés ou très rapprochés. Équipe. Troupe. Formation. Règle ayant été appliquée. Puanteur transmise de père en fils avec adjonction de honte au passage. (Loc.) Porter (ou se porterpéniblement à la hauteur de, instants brefs et rapprochés produisant un effet de succession rapide. 
POÉSIE – En short bilingue. Oiseau (ou autre) étêté. 
NŒUD (m.) – Vis formant axe, autrefois employée pour joindre en leur milieu les deux branches mobiles d’un sécateur. (Mét.) Ces deux branches, tranchantes en dedans. (Dr.) Tête de nœud, œuvrant à la révélation de la vérité. V. étouffat. "


 

DOMINIQUE QUÉLEN
Finir ses restes

"ici ça sort du 
 
bras et coule 
 
sur deux fois 
 
la longueur 
 
du bras il n’y 
 
a plus d’air du 
 
tout tu vois 
 
dans ce bras 
 
une anguille tu 
 
vois un homme 
 
ayant fini de 
 
vivre ou de 
 
jouir et ce qui 
 
a suinté devant 
 
et le long 
 
est l’expression 
 
même de sa 
 
pensée comme 
 
son exercice "

2011, Rehauts


2011, fissile

DOMINIQUE QUÉLEN
Câble
à âmes multiples

"Tout en s'activant chacun de leur côté, on sent qu'ils communiquent. Les corps sont à présent soudés entre eux au point de former une masse indistincte et de couleur neutre, ou alors c'est parce qu'ils sont dans un recoin. Ce que voyant, l'œil du jeune attaché se dilate et se contracte tour à tour, ainsi que son cœur qui a quand même souffert par le passé. Un bon désir le pousse et l'entraîne. Il se verrait bien tenter quelque chose, un geste, une attitude un peu audacieuse. Mais un écriteau prévient : Attention, possibilité de jus dans ce câble. Il faut en rabattre et subir, comme les autres. Au lieu de s'en plaindre, il s'en félicite et s'en réjouit : il n'y a pas de honte à s'abaisser. L'affolement de son cœur et de son œil, il en convient, n'était que le résultat mécanique de l'action d'un clapet."


2010, fissile

DOMINIQUE QUÉLEN
Loque

"La forme des jardins de Rome. Blouson pick-up. Assagialo, amico. Prendi. Avec une audace oui proprement de mouche qui te tourne autour. Et ces yeux, ces yeux. Tout est jaune ici, jaune pâle. Ou ocre. Ou blanc. Toute la végétation est naturelle, oui. On vend des perles, des porte-clés, des baskets, bottes, bottines, ça n'a jamais vraiment marché. Le cuir des fontes, le fer des cantines, la nage en bassin. Santa Maria dei Set te Dolori. Tout par sept, amico : sette lingue, sette paure. Un misto di tutto, vero ? Et l'autre pendant ce temps : ceci est mon corps, etc. Jusqu'ici : et il montre avec la main. Toute une organisation. Et d'où le sors-tu ce petit couteau de dame. Touche mon ventre. Ces petites taches ? Je crois depuis toujours. Vois le tableau du Caravage : Narcisse, son genou-tubercule au centre. Et là-dessus, le vélo. Un mi-course, oui, mais avec ça tu traces. Et lui le fémur droit. Tumeur. Sa vie dans un fauteuil (depuis un vingt-cinq mai,figurati). C'est là qu'il a sorti sa phrase obscure : La nature a la beauté de ce dont elle est l'ordre. Il est gaucher mais il désigne tout de la main droite. Un sujet quelconque. Soutien-gorge, à petits bonnets oui et non. Tu fais fortune en deux ans. Pas le fémur cette fois. La torsion du poignet. "


2009, La Rivière Echappée , Apogée

DOMINIQUE QUÉLEN
Comme quoi

"né noyé. Avec tout, avant de tout perdre. Peaux
successives rentrées, vêtements séchant sur les os,
les nerfs, les vases et les boues pélagiques. Les
ôter, travail délicat. Le corps étreint et modelé par
un jeu de forces. Plus étroit sans chiffre ni autre
effort qu'un chemin possible où sont déposées des
lois (le sentiment des faits, leur situation respective),
au ras d'un sol où les pieds sont naturellement
formés d'un dépôt. L'espace entre les choses
les cimente "

"Arbre qu’on voit ici tourné vers soi (c’est-à-dire une présence où entre une part de calcul), la totalité du tronc plaquée contre le vide. Les bras debout, répandus cent fois comme de l’eau dans l’air ainsi formé. Le corps aussi, en ses parties reclus et ramassé, avec une économie de gestes qui tient du mort. La rondeur familière des oies qu’on regarde et qui nous regardent passer près des herbes."

 

 


DOMINIQUE QUÉLEN
Le temps est un grand maigre

"Souplesse, soupir de toute la matière quand la pluie cesse et que dans la cour en sont à se redresser les arbres, feuille à feuille. C'est là qu'on entend le bruit mou d'un moteur qui a chauffé. Au bord du capot, la main prête à saisir se rétracte. Il y a dedans et dehors à présent. Une fois levé (comme les deux versants de quelque montagne au loin rêvée sous la neige), le bruit du dessous s'échappe. La main fait alors un signe au sens obscur et disparaît. - Et rien ne devrait finir avec elle? Le moteur et l'arbre et la cour sont pourtant la même pièce dans une autre main qui a bougé un peu plus haut."

2007, Wigwam


2002, Apogée

DOMINIQUE QUÉLEN
Petites formes


"Chasseur au pas mesuré, chasseur très subtil dans des lieux secs, tout en aplats. Perdu, longeant. Cherchant l’écart le plus précis. Dans le repos le mieux réglé, une inquiétude. Un désir de blessure qui élancerait encore après des années. Poursuivant (en songe) un gibier différent. Pensées trop rapides, fuyantes : des guêpes. Jusqu’à ce que la chasse et son objet, comme le jour ou la nuit, s’emboîtent."