jEAN-PASCAL DUBOST
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Soirée Oenanthique organisée par la Bibliothèque de Mordelles (35)avec Jean-Pascal Dubost et Jacques Josse

JEAN-PASCAL DUBOST
Intermédiaires irlandais



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(Afin de ne céder le passage à aucun regret et de maintenir les mots à distance du coeur niais pour mieux s'en rapprocher, j'ouvre le champ de l'imagination par où m'échapper à et de moi- même, je ne sais encore, à moins que les deux, et se faire fiction, et faire en sorte que toute ressemblance avec des événements non vécus ne soit pas fortuite et paraisse calculée ; subterfuge et prétexte, refuite à requoy dans la seule fin d'y croiser l'autre, ni lecteur ni semblable, mais moi, en tant qu'autre, cet inconnu constant me plongeant dans l'inconstance de vivre. À l'instant j'ai eu la main en suspens, après réfléchir ; la main suspendue mesurant la distance entre le vécu et la fiction, et revenant à la page, elle inscrit des mots distants, et j'en ai grand besoin, car je peine.)


JEAN-PASCAL DUBOST
Intermédiaires irlandais

...J'aime profondément marcher longtemps, multiplier les intensifiants de vie, sentir le corps monter en puissance, et puis sentir sa fatigue, dans la plante des pieds durcie, dans les mollets qui tiraillent, dans les genoux qui grincent et dans les cuisses lourdes: ils me donnent la possibilité du monde en détails.

Je passe mon temps à ne plus savoir.

Le marcheur qui avance dans une relative absence de contraintes, sous les trombes d'eau, sur la route grise et sombre et cinglé par le vent et qui passe devant un pré où des vaches sont rassemblées contre la haie et serrées les unes contre les autres et stoïques, peut se voir rempli, bien qu'il soit trempé, d'une joie paradoxale et la partager avec les bêtes qui le regardent passer avec cet air étonné qu'elles montrent à toute occasion. Je me laissais distraire par l'odeur de pluie, je croyais tourner le dos à tout idéal, j'aimai cette idée de tourner le dos, de ne rien attendre, de ne rien espérer, ni désirer, ni vouloir, de ne rien, je croyais aller plus librement au­devant des surprises; quand à l'approche de Casteltownbere, j'allais croiser un groupe de cyclotouristes français tous enharnachés dans un imperméable jaune, et perdus, qui consultaient leurs cartes, enclines à s'envoler. Pour n'avoir pas à subir une irruption humaine dans ma solitude, je penchai la tête, fixai le bitume et contemplai la moor que j'avais en réserve dans la mémoire et fus sourd au « mister, please » qui me fut adressé; j'aimais la goujaterie dont je venais de faire preuve; et n'en eus aucun remord.


Editions L'Idée bleue

JEAN-PASCAL DUBOST
TERREFERME

Le paysage ne nous envahit ni donc pas
les pages que nous établissons au format
portrait présentement, aucune figuration
graphique de la configuration d'un
assemblage de pays où la nature tiendrait le
premier rôle et où les figures humaines et
animales et les constructions auraient une
place accessoire (la nature tient -elle encore
un premier rôle dans le paysage?), rien qui
simule l'ouvrier ou le paysan, le schiste,
la friche, l'ardoise, le fer ou le bocage, la
mine ou la ferme; non; qu'on voie dans
notre prose en vers injustifiés ponctuée de
poèmes en bloc (de prose), dans notre
prosimétrie autrement dit, tantôt de
l'amusement, tantôt une fabrication
fantaisiste où le vers est mené en prose
suivant le train de nos humeurs
contemporaines à nos déplacements in situ
et la netteté des souvenirs se fichant dans
l 'humeur contemporaine à l'écriture à
laquelle ils impriment, puisque être
consiste en mouvement et action, un train
légèrement variant, volontaire égarement
doué d'évident relâchement dans un entre
prose et poésie, et tenons pour certain que
notre façon ordinaire d'aller, c'est d'aller
d'après notre curiosité, à gauche, à droite,
au devant, en arrière et que ce que nous
proposons, nous le changeons tantôt, tantôt
encore nous retournons sur nos pas,
finalement, notre maître rythme, n'est-ce
pas l'irrésolution, et notre maîtresse forme,
l'imperfection?

Saison 2009

En lisant, en dégustant, avec Jean-Pascal Dubost

 



JEAN-PASCAL DUBOST
Vers à vif

Avec le tout premier mot de toute une montagne accouchée, l'abeille écrasée, le lac asséché, le bled à sac, l'or en boue, le feu restitué, rodomonté, remenant, caramel, je verrais ne plus rien dire de travers à ma révérence je rêverrais -

Quand à toutes pompes j'aurai cuvé, j'aurai rêvé, quand j'aurai liquidé toutes mes épiceries, plus rien à dire, et quand c'est mourrir qui comptera plus que si la force vient à manquer plein milieu d'une phrase, c'est qu'alors la phrase sera finie, que j'aurai bien vécu en prose, et qu'on me cloue le bec -

 

éditions Obsidiane, 2007


JEAN-PASCAL DUBOST
FATRASSIER

Sangliers rétincelés
Quand un groupe au pied d'un chêne vermille sous les feuilles ou fouge, cherche de quoi se nourrir, l'un d'eux lève le chef, et grogne s'il pressent quelque danger qui n'est autrement que l'homme, et si c'est une fausse alerte, fait comprendre que ce n'est rien, fausse alerte (Fausse alerte) -

Le Belluaire satirique
LE CROCODILE
(auto-portrait)
Le crocodile est un animal pourvu de plaques osseuses saillantes incluses dans le bouclier dorsal connues sous le nom d'ostéodermes et d'écailles piquantes sur la mâchoire inférieure qui rendent sa peau impropre à l'utilisation en peausserie comme elles le protègent des incommodités que la nature lui a infligé au cours de son évolution parmi lesquelles l'environnement des hommes dont il s'efforce d'éviter le contact en sinuant par des eaux troubles où il peut passer inaperçu et n 'y chasser qu'en cas d'extrême danger du fâcheux, broyant sa proie d'un coup de satire-

 

éditions Tarabuste, 2007


JEAN-PASCAL DUBOST
Nerfs

Nerfs à vif sans relâche et c'est ainsi, qu'ils me font fonctionner foncièrement qui je suis quel que soit quand je quitte l'habitat principal où je vis et demeure et travaille ils me font prendre peau d'horzain et me rendent frogné, alors partant, sac de proses et proses de terre en tête du mal d'horreur qui me travaille en ronge « loin des rumeurs de libération entretenues tout au long de la journée depuis Bagdad », et la rumeur aux trousses, j'entre en résidence au monde les mots à la bouche où que ce soit ainsi sans relâche aussi vif à Rennes -

 

éditions La Dragonne, 2006


JEAN-PASCAL DUBOST
Dame

L'amour me fait faire le poète
Et les vers cerchent le repos

Agrippa d'Aubigné


C'est l'hiver en Bretagne et la pluie, le vent, le panneau inondation sur La Lauducière, aucune matière et rien sinon que force et de vouloir sur quoi j'insiste rêveusement déplace et transporte et rapproche, entre la fougère et la dépression, sans sonner l'orphée je frotte sans attendre le déluge au cours de mon rythme contadin, hausse à la virgule le ton, sinon tout qu'ombre et fumée, sans execution, sans œuvre, sans effortz, et chagrine pour la journée, si tu rajoutes un mot mal placé plus haut que l'autre de plein fouet-

éditions 1 :1, 2005


JEAN-PASCAL DUBOST
Monstres morts

BIZARRRIES
Qu'ont-ils mais ce que je veux d'un âne l'humeur rétive, la raideur d'un cerf fier défiant, d'un loup l'échine orgueilleuse qui pèse sous les coups de légendes, l'appétit du lion, la course increvable et le corps d'un seul trait font mômeries, ensemble, queue leu leu, oh les mots-monstres, fête les fous -

 

éditions Obsidiane, 2005


JEAN-PASCAL DUBOST
Les loups vont où?

Dans la brouette en bois sans bords et qu'on fait vinaigrette ou pousse-pousse à tour de rôle à vide on t'apporte et ça pèse et sable, et briques et ciment, tombereau d'autres jours on y transbahute de quoi, le porc mort ou des bottes, de foin, de paille ou le fumier chaud fumant qui dégouline de purin ça que tu me verses sur des poules et le fumier sec.

éditions Obsidiane, 2002


JEAN-PASCAL DUBOST
Fondrie

Extraction
Car il te faut de l'effort et souffrir et de la sueur, avoir sous les ongles du sable, noir (à moulage), et laisses-y, même quand tu vas le dimanche aux cèpes, s' y mêler la terre et tâche de ne pas trop y penser mais de faire comme fichtre on te dit, forge de toutes pièces!

 

Cheyne éditeur, 2002


JEAN-PASCAL DUBOST
Les nombreux

...tout est bon lueur ou clarté dans l'obscur au coin d'une porte prise
pour que les mots soient visibles et lisibles et vivaces

pour avoir de toute manière autre chose ou ça

on ne lit pas à table!...

 

Le Dé Bleu, 2001


JEAN-PASCAL DUBOST
L'Ardoise

sur l'ardoise

l'assiette du jour
trente francs
ne fait pas crédit

mais quel plaisir d'y passer l'éponge

 

 

Wigwam, 2000


Des lieux sûrs, Tarabuste, 1998


JEAN-PASCAL DUBOST
KATY COUPRIE
C'est Corbeau

corbeautière
J'avais noté dans un cahier plusieurs choses intéressantes sur les corbeaux qui traînent dans mes rêves, cette odeur d'oreiller qu'on remarque quand on les prend dans les mains, leur air goguenard quand ils marchent et leur mine de rien en vol, comme si tout pouvait se résumer dans un cahier qui leur est ouvert jour et nuit.

 

Cheyne éditeur, 1998, 2001, 2003, 2006



Les Cochons prosaïques, L'Arbre, 1996
Poèmes ravis, La Bartavelle, 1995


JEAN-PASCAL DUBOST
Les Quatre-chemins

Elles ne s'écrivent pas
que tout va mal
ni le contraire,
mais elles savent lire
dans la fatigue
de leurs enfants,

QUAND ILS VIENNENT

 

 

Cheyne éditeur, 1995, 1997, 2003


Les Vieux Costumes, L'Arbre, 1993

Carnet celtique, La Bartavelle, 1992


Roger Lahu:

"Jean Pascal Dubost  est un grand copain de longue date, je sais donc qu’il ne s’offusquera  pas si d’emblée, tout de go, sans ambages  ni précaution oratoire je  déclare qu’il est un foutredieu de bougre de fuckin faiseur de poèmes !
Faiseur dis je précisément  c'est-à-dire  fabricant  forgeron  fèvre  orfèvre  même en cette matière si retorse à la forgerie qu’est la poésie.



Ou peut être faudrait il dire « fondeur »  « maitre fondeur », cet ouvrier métallurgiste de haut niveau de compétence qui travaillait autrefois dans les hauts fourneaux. Rien d’étonnant d’ailleurs qu’un des livres de JPD (paru chez Cheyne)  s’intitule « Fondrie » : livre écrit en Haute Marne à l’occasion d’une résidence et consacré à une ancienne fonderie d’art. Dans le dernier texte  JPD énumère avec  admiration et respect « le dessablage l’ébarbage le réparage et le ciselage et l’ajustage » et autres opérations savantes, et  termine par un hommage fraternel à « l’attachement l’estime pour son travail de l’ouvrier …seule vraie marque de fabrique ».
J’ai  la même admiration et le même respect pour le travail de Jean Pascal. Parce que c’est vraiment lui aussi un maitre ouvrier de ses textes et  un « horrible travailleur ». Toujours insatisfait, toujours désireux de mieux, toujours lui aussi à ébarber ses poèmes à les ciseler les ajuster. Ce n’est pas par coquetterie qu’il fait figurer en fin d’un autre de ses livres   « Monstres Morts » parus chez Obsidiane, un « explicit » retraçant la fabrication du livre de 22 juin 2000 au 9 septembre2002 (« relecture cinquième écriture et fin »). Et dans un  texte publié  dans le dernier numéro de cette super revue qu’est  « Dans la lune » il écrit : « je remonte dans ma cellule empressé de retrouver mon cahier de brouèmes encore ouvert, plus noirci de ratures que de mots »
Dans un poème de Jean  Pascal  (et dans la construction d’un livre complet) rien n’est laissé au hasard, tout est minutieusement agencé, méticuleusement agencé. Chaque mot, chaque tournure, chaque virgule est savamment disposé à sa place juste, là où, comme un rouage minime mais indispensable, il joue son rôle exact dans le grand jeu du poème.  « Je cherche, écrit il dans « vers à vif » un bouquin qui vient juste de sortir chez Obsidiane, je cherche un bon arrangement à ce bordel de mots qui m’use joyeusement »    Oui vraiment nul laisser aller dans l’œuvre de Dubost, mais une extrême rigueur.  Et comment appeler autrement que « style » cette rigueur là ?
La poésie de JPD est extrêmement stylée ! 
Mais que cela ne vous amène pas trop rapidement à de fausses conclusions : travail rigueur – j’aurais pu écrire aussi exigence   (ah dieu sait si cet animal est exigent et pas qu’en poésie !!!). Que cela donc ne vous fasse pas accroire que nous avons affaire à une poésie dépouillée, ascétique, voire pis froide desséchée puant le laboratoire (comme on en connait quelques unes). OH QUE NENNI ! Quel  contre sens ce serait.   Ce gars est  accro à Rabelais et à  Kerouac  c’est tout dire !
Car si JP est un travailleur acharné  de la langue, c’est aussi un sapré jouisseur des mots !  Un gourmet, un gourmand et même carrément   un vrai goinfre, un ripailleur   Dans le texte de « dans la lune » il écrit ainsi « Rabelais leva les interdits et m’autorisa à parler la bouche pleine : le poète parle la bouche pleine de  mots » ! Et là je l’assimilerai volontiers à un cuistot, à un maitre-queue ! Dépiautant les mots, les malaxant, les pétrissant ! Et vas y que je rajoute une pincée d’ancien françois langage, une giclée de franc parler paysan venu des territoires sonores de l’enfance, une rasade de parlure bistrotière, et que je t’assaisonne d’une citation d’un poète de la renaissance (parmi ses préférés) .Et il surveille ensuite attentivement la cuisson, goute regoute.  Et les sauces ah les sauces syntaxiques de Jean Pascal : grand veneur !  épicées !  Sur que ça n’est pas  mets pour appétits chétifs, chipoteurs amateurs  timides et inquiets pour leurs petits estomacs fragiles d’écriture « déshydratée et désincarnée ».  I
Il y a d’ailleurs dans son  bouquin paru récemment chez Tarabuste « Fatrassier » une section intitulée « mangeries » composée de « brouèmes manducatoires » de haute graisse verbale et  incroyablement gouteux !
Qui dit cuisine dit boisson, je filerai donc une dernière métaphore pour présenter Jean Pascal : maitre fondeur, maitre queue  il est aussi maitre vigneron ! Cet homme (qui est aussi un incroyable passeur de poésie via ses activités critiques dans les revues, via son rôle désormais de président de la maison de poésie de Nantes, ce gars donc lors d’un séjour dans la région de Reims a mis sur pied des lectures qu’il appelle les Dithyrambes : à chaque fois sont invités un poète qu’il présente, et un vin que présente un de ses potes viticulteur champenois ! Mélange admirable !  Vigneron donc  et de champagne , ce vin d’assemblage où  tout l’art est de doser  cépages ,terroirs , années , de surveiller les processus de champagnisation , etc  C’est ce que fait Jean Pascal Dubost avec un doigté qui s’affirme de livres en livres , avec un savoir faire de plus en plus admirable , d’où des livres grand crus de plus en plus capiteux , de plus en plus charnu . La poésie de JP ça n’est pas du petit vin de soif  qu’on avale comme ça sans y prêter attention , mais du millésimé , qu’il faut déboucher avec soin , faire tourner dans son verre , humer longuement , et déguster à petites slurpées jouisseuses .Mais tout aussi bien on peut  se la lamper à plein hannap  : et s’échauffer véhémentement  le ciboulot jusqu’à chanter matines à minuit et vespres  au petit matin . Moi j’avoue qu’elle m’enivre plus que plaisamment la poésie de Jean Pascal.
Alors, prêts à la dégustation. Tous à table ! "  Cette grande table écrit JP   qu’est la langue""



Saison 2008

En lisant, en dégustant, avec Jean-Pascal Dubost

 






"Mais le mot avant-garde, tel qu'il est le plus souvent proposé, me paraÎt triste à mourir, il vient freiner un mouvement, figer une forme. Quand je lis des déclarations sur la mort des formes, cela m'énerve passablement. Les formes ne meurent pas, el/es changent. je ne crois pas à la mort de la poésie ou de quoi que ce soit d'autre. Les choses ne meurent pas, el/es se déforment. "
Laurent Cauwet in Le Matricule des Anges n°27




...je commence par le mince commencement que la griffe du récit ne me ronge et
j’y plonge ne me nuit et tant pis car dans l’os creux du vol je ne connais que
le vol et mon nœud je le file sans avoir jeu ni lieu où le voyage est merveille
est tournesol voyage de merveille est réveil du mirage où la miette l’aigrette
la fête est merveille est vanille est veille est vermeil d’étincelle est
lettrine d’orfèvre est lunule du mystère et je décompte les fées et je racompte
mes frais et par la fin j’y remonte car le vocable est ma fable

 

Haroldo de Campos, Galaxies, La Main Courante, 1998 (trad. Inês Oseki-Dépré)





 





« Si être un bon éditeur, c'est se tromper neuf fois sur dix, nous, il faut nous tromper le moins possible pour continuer à exister et vraiment affiner notre travail. Ces livres, on les porte, réellement, dans une valise justement, et l'une d'entre elles fait 47 kilos! Il faut alors vraiment les aimer pour les transbahuter comme ça depuis plus de vingt ans. C'est ce qui fait qu'on ne les vend pas à n'importe qui. Mais à ceux qui les veulent vraiment. » (Djamel Meskache)
Djamel Meskache a fondé les éditions Tarabuste en 1986 . Il en est la cheville ouvrière avec Claudine Martin.



 


POÈME DU HACHOIR À VIANDE ET DE SA TRANSMISSION
hier
pour la première fois
en compagnie d'amis
j'ai fabriqué des pâtés et des terrines
avec des foies de canards
et du porc
diversement aromatisés

aujourd'hui
j'ai appris que la maison
de ma grand-mère grabataire
- elle vit dans un établissement «spécialisé» ­
allait être louée
ses enfants
ont dû la vider
meubles ustensiles bibelots papiers
tout
a dû être sorti
toute une vie

et il y a eu partage
et j'ai compris à demi-mots
que cela ne s'est pas fait sans mal

on m'a dit
que j'avais ma part
cela m'a horrifié
horrifié

et soudain
m'est apparue
la signification évidente
de tout cela
et l'horreur a laissé place
à un drôle de sentiment
aromatisé de tendresse diffuse
d'ironie
et d'acceptation presque fataliste

alors j'ai demandé
si ma grand-mère par hasard
n'avait pas possédé un vieux hachoir à viande
pour faire des pâtés et des terrines
on m'a dit que si

j'ai dit que j'en voulais bien

Roger Lahu. Au plus près. Ed Le dé bleu